Le livre n'a pas le sens de ce qui y est écrit, mais celui de l'avoir été (de l'être).
Les cycles créent l'écart d'attente; dans cette attente nous existons. Il n'importe pas qu'il arrive ceci ou cela, il importe que quelque chose soit en instance de survenue.
Rien n'est sauf le temps. Le temps n'apparaît qu'à travers les étants. Le temps des étants est toujours cyclique, et composé d'autres étants, dont le temps est également cyclique.
S'il s'agit de chercher un «sens» à tout ça - autrement dit, s'il s'agit de poser la question de l'être -, on ne peut partir que du temps des étants, qui débouche sur le problème de l'être de l'étant. Jusqu'ici, la donne heideggérienne peut sembler juste.
Lorsque l'on considère le déplacement d'un étant sur le ligne courbe de son cycle, l'on conçoit que l'instant (la position X sur la courbe) n'a de «sens» qu'en fonction de ce qui précède et de ce qui suit. À supposer qu'un étant puisse prendre «conscience» de sa propre «réalité», le «sens» de cette dernière ne pourra lui apparaître que dans cette insertion entre passé et avenir, entre X-1 et X+1. S'il attribue une «valeur» à ce X, il le fait relativement à X-1 et/ou à X+1. D'où les représentations, fausses, du progrès et du déclin. Fausses parce que l'accroissement ou la diminution, le progrès ou le déclin sont inférées par une représentation erronée du temps, qui laisse croire à une ligne, alors qu'il s'agit d'un cercle.
De fait, X+1 a la seule «valeur» d'être un X, et non celle d'être davantage qu'un X.
En ce sens, l'être correspond à l'Éternel Survenue de N'importe quoi (et certainement pas à l'Éternel Retour du Même, qui ne considère que les valeurs ajoutées).
Ainsi l'étant conscient (l'homme) est-il simultanément «vivant» et «mortel», sa «vie» étant comprise comme l'ensemble des X, à partir du X qui sépare l'avant de l'après, et sa «mortalité» comme la compréhension diffuse de l'insertion de cette série dans un cycle.
Si l'homme peut «valoriser» ontiquement ses instants d'une multitude de manières, la «valeur» ontologique de chacun de ses X est la même. Dans le cycle, tous les X se valent.
Si l'on reporte ce schéma à l'ensemble - car tout étant est cycle - rien de ce qui survient n'a d'autre sens que cette survenue comme telle.
Le Kosmos sombre alors dans un relativisme absolu, où la «valeur» d'une survenance ne peut venir de sa particularité. Du point de vue de l'être, la valeur absolue, le sens plein, sont donnés dans la survenance elle-même, à laquelle rien d'ontologiquement valable ne peut être ajouté.
Cette vue d'ensemble est indéniablement correcte. Cependant, elle est inacceptable. Pourra-t-on affirmer «fausse» une représentation vraie, sous le seul prétexte qu'elle est inacceptable?
Tout le problème repose dans cette possibilité avérée qu'a l'homme de «juger» la mécanique ontologique. Où se tient-il, lui, pour porter ce regard d'ensemble? Comment l'être peut-il produire un étant contestataire?
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Le rapport entre le sens et le signe est toujours cherché selon les termes des rapports de causalité. Lorsque l'on parle ou que l'on écrit, le sens précède le signe. Dès lors, tout ce qui est perçu - interprété comme signe - est compris comme étant précédé d'un sens.
Dans la conscience de veille, ce qui reste en mémoire des rêves est compris de la même manière. Mais le sens, en amont de ces «signes», reste introuvable.
En fait, dans le rêve - du moins dans ce qui en reste dans la conscience de veille -, tout se passe comme si le signe précédait le sens. (D'où l'idée qu'il n'y a «personne»...)
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