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Yvon Corbeil

(IG) Du côté de chez Sartre


Le premier philosophe patenté que j'ai croisé dans ma jeunesse fut Sartre. Dénonciation d'un système de croyance qui aliénait à la fois la liberté ainsi que la nécessité de se responsabiliser, voilà qui allait dans le sens de ce que je pensais déjà, conforté désormais par l'appui «officiel» d'une pointure.


Il m'a toujours semblé en effet, et j'en suis toujours persuadé aujourd'hui, que le renoncement à la liberté - pour se placer confortablement sous l'emprise d'un parapluie dogmatique - et son corollaire - l'idée que je ne suis responsable de rien puisque je me contente d'obéir - sont des tares majeures de l'humanité.


J'avais découvert l'analyse de Sartre par le biais de la conférence de 1945, L'existentialisme est un humanisme, conférence destinée à des journalistes et qui, de ce fait, tourne les coins ronds par rapport à de nombreuses difficultés et reste simpliste en faisant l'impasse sur le fond, lequel seul permet l'élaboration de ces thèses sur un plan philosophique (et non seulement social ou politique).


À la recherche de ces fondements de l'existentialisme sartrien, l'une des analyses les plus intéressantes est celle proposée dans L'être et le néant et qui porte sur l'impossibilité pour l'homme de saisir objectivement ce soi qu'il est. Inspiré par Heidegger - lequel niera cette paternité, faut-il le rappeler - l'idée selon laquelle ce sont les autres qui «savent» qui je suis, alors que pour ma part je ne fais que quémander chez eux cette définition que je souhaiterais conforme à ce que souhaiterais être (ou, plus naïvement, à ce que je pense être) permet à une vieille hantise de l'homme (le rapport trouble avec les autres) de trouver une explication théorique acceptable. (La psychologie devrait d'ailleurs s'inspirer de ces analyses plutôt que de faire dans le grenouillage divers.)


La conclusion bête que l'on tire de cette thèse est que l'homme, plutôt que d'assumer ce qu'il est, passe son temps à corriger l'idée que les autres se font de lui. D'où l'aliénation quasi systématique de sa liberté.


Il apparaît alors que Sartre fait, au fond, figure d'un Kant socialisé. La liberté, qui doit être employée pour affirmer son humanité en définissant les valeurs et en adoptant un comportement idoine est négligée au profit d'une tutelle de complaisance.


Au fond, Sartre découvre que le programme des Lumières, tel qu'on peut le concevoir imaginé par Kant deus siècles auparavant, n'a jamais été réalisé. Cette faillite n'est pas causée par les croyances religieuses, mais plutôt par le fait des croyants. Autrement dit, la bêtise est une épidémie.


Il manque simplement alors à Sartre de nommer le seul remède possible, encore qu'il ne s'agisse pas d'une panacée: l'éducation.

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