Confucius n'ayant rien écrit, on se fie aux témoignages de ses disciples. Les Entretiens sont censés représenter ses propos et son enseignement avec fidélité. Par la suite, ses disciples, témoins directs ou épigones plus tardifs, infléchiront cet enseignement selon diverses tendances. Surtout, ils développeront - ou tenteront de développer - ses maximes, qui prêtent trop facilement à toutes sortes d'interprétations. (Ça peut être à peine pire que pour Nietzsche...)
Développements en aval donc, lesquels pourront s'éloigner de ce que pensait Confucius, mais en amont aussi, lesquels révèleront certainement quelques contradictions.
Ceux qui chercheront le Confucius «historique» tomberont sur le même os que ceux qui cherchaient, et cherchent encore, le Socrate tel qu'il a vraiment été. Et on pourrait ajouter à cette liste, quoique dans un autre registre, Jésus.
Il y a certes un intérêt intrinsèque à chercher à dévoiler les figures culturelles majeures dans leur vérité historique. Mais ceux qui s'adonnent à cette pratique négligent trop souvent l'essentiel, à savoir que ce qui compte vraiment, c'est ce qu'ont été ces figures dans le paysage culturel et ce, indépendamment de leur réalité historique.
Ne nous leurrons pas, le Socrate que tout le monde connaît, celui qui «ne savait rien», recommandait de se «connaître soi-même» et pourfendait les Sophistes en s'appuyant sur l'idée qu'il y a des vérités universelles représente le «vrai» Socrate. Probablement que Socrate lui-même ne se reconnaîtrait pourtant pas dans cette description...
Même chose pour Confucius ou Jésus. Même chose, mais forcément dans une moindre mesure, pour les grands personnages ayant écrit. Ces grandes figures culturelles sont ce qu'elles sont devenues dans la culture, et non pas ce qu'elles ont été «réellement».
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